Creative Leadership program, Paris College of Art, 2015

Durant l’automne 2015, le programme de Creative Leadership du Paris College of Art (Design Management Dpt) a été confié à Raphaële Bidault-Waddington afin d’y conduire d’une part un enseignement sur l’économie créative, et d’autre part un cycle de workshop autour du projet Paris Galaxies dont l’école est partenaire.

Les étudiantes ayant participé à ce programme sont : Razan Alissa (Abu Dhabi), Sophia Gorsun (France-Suède), Simone Langhoff (Danemark), Natalia Mladenovic (Suisse), Renata Prieto (Mexique)

Prospective de l’art et de l’économie créative

La phase pédagogique a consisté à cartographier les différentes formes d’ »entreprises créatives », de l’atelier d’artiste à l’agence d’architecture, des compagnies de spectacle vivant aux collectifs online, et à comprendre leurs modèles organisationnels et économiques, schématisés sous forme de canvas. Au-delà de l’ »économie culturelle » qui la parque dans un secteur, le programme analysait ensuite leurs modalités de création de valeur en collaboration avec le monde économique conventionnel, les villes, les universités et le web.  Ceci permet d’appréhender de manière concrète ce que signifient des jargons et théories tels que les industries créatives, la « ville créative » (Landry), l’ »économie créative », la « classe créative » (Florida), la « société créative » ou encore la notion émergence de « commun » (Bauwens).

La recherche collective d’exemples internationaux tout au long des séances permet à chaque étudiant à la fois d’analyser ses préférences personnelles et d’identifier les pratiques les plus innovantes.  Cette méthode pédagogique est inspirée des analyses de tendance par « signaux faibles » (usages considérés comme innovants ou précurseurs), et apprend par la même occasion aux étudiants à s’approprier la notion d’entreprise créative pour imaginer leur avenir.

Canvas Design Workshops

La phase workshop du programme permettait d’être encore plus concret et de passer au design de canvas (canvas design) d’entreprises créatives de nouvelle génération, en l’occurrence le 6B à St Denis, et une hypothétique plateforme collaborative online, spin-off du projet Paris Galaxies (voir recherche sur scénarios UX et interfaces réalisée avec les étudiants en Master Design Graphique du Campus la Fonderie de l’Image, 2015).

Cas d’étude 1 : Le 6B, ruche créative autonome à St Denis

Le LIID remercie chaleureusement le 6B pour l’accueil et l’attention portée aux recherches menées par les étudiants du Paris College of Art.

Lors de l’audit esthétique de la constellation artistique du Grand Paris (voir l’analyse réalisée en 2013-14), le 6B a été identifié comme porteur de plusieurs vecteurs de transformation et d’innovation urbaine ce qui en fait un cas d’étude particulièrement intéressant. Vaste bâtiment de bureau ré-approprié légalement à titre gratuit depuis 2011, le 6B est un lieu de pratique et d’événements artistiques autonome, devenu très populaire. Ceci lui vaut d’être à la fois un « hub artistique » iconique du Grand Paris et un lieu fédérateur d’une large « communauté créative » avec ses 180 résidents (grande majorité d’atelier et de micro entreprise créative) et très nombreux partenaires. A l’occasion de ses événements et surtout du festival annuel FAR (Fabrique A Rêve), le 6B a également pour habitude d’expérimenter de nombreux dispositifs performatifs et éphémères dans l’espace public, créateurs de nouveaux usages et de nouveaux imaginaires pour le quartier.  De fait, le 6B doit être vu comme un Living Lab qui s’ignore et qui pourrait se saisir de cette dimension résolument innovante pour développer son économie et se projeter dans l’avenir.  Tel était le challenge lancé aux étudiants (y compris une initiation aux enjeux du Grand Paris), qui ont pu visiter le 6B et interviewer son fondateur Julien Beller.

Recherche Service Design, micro-économie et Innovation Sociale

Le workshop a tout d’abord consisté à cartographier et à dessiner sous forme diagrammatique le canvas de l’activité du 6B pour en comprendre l’organisation et le modèle économique.

La deuxième étape s’attelait à une recherche de type « service design » afin de mettre en lumière tous les gisements de valeur supplémentaire, et notamment par la valorisation des talents et compétences en résidence.  Plutôt qu’une usine à gaz en terme de management et de remodelages organisationnels (l’organisation du 6B se veut informelle), ceci s’est traduit par la recommandation de nouvelles fonctionnalités et offre sur le site web susceptible d’augmenter la micro-économie locale, à savoir :

- un « creative skills counter » (comptoir à talent créatif) où les résidents peuvent proposer leur compétences (toute discipline confondue) à leur manière et avec un portfolio,

- une galerie d’art contemporain avec une ligne curatoriale exigeante (notamment par l’invitation de curators extérieurs) et directement reliée à celle de la galerie du 6B.

- l’organisation d’une foire d’art contemporain off et « abordable » au moment de la FIAC.

- offrir les compétences évènementielles du 6B (et celle de savoir faire sortir les parisiens en banlieue), sous forme de prestation pour l’organisation de manifestations artistiques et festives dans d’autres sites du Grand Paris dont le 6B peut se revendiquer d’être un acteur-clé.

- le développement ou l’accélération des programmes pédagogiques, ateliers, workshops et masterclass, selon plusieurs modèles économiques, et avec un package-type destiné à procurer facilement un revenu complémentaire aux résidents précaires du 6B (démarche d’innovation sociale par et pour les artistes).

Canvas Design, Recherche sur le futur du 6B à St Denis, et le développement de son écosystème

Stratégie Design Thinking et Living Lab

Enfin, en plus d’assurer son économie locale, et condition de sa survie, le 6B doit trouver le moyen de financer la rénovation de son bâtiment (structure architecturale, électricité, chauffage, etc.) qui appartient à un promoteur bienveillant mais qui légalement pourrait être détruit et reconstruit (à coût équivalent). C’est en approfondissant la notion de Living Lab et par des méthodes de type Design Thinking (stratégie globale), que le groupe de travail a pu imaginer une politique de partenariats avec de grands opérateurs de l’innovation urbaine, susceptible de donner au 6B un avenir durable.

Toutes ces recommandations ont été partagées avec l’équipe du 6B qui les a intégrées à son plan de développement (chantier en cours).

Contacter le LIID ou le 6B pour accéder à ces recherches stratégiques.

Plateforme Paris Galaxies et formes d’écosystème

A l’inverse du travail sur le 6B dont le bâtiment et le canvas forme un écosystème de pratiques multiples, chacune doté d’un modèle collaboratif et économique spécifique, aborder le design d’une plateforme online signifie se focaliser en tout premier lieu sur une fonctionnalité unique et centrale. Les recherches actuelles en matière de design de canvas et d’interface des plateformes de l’économie collaborative, insistent sur la nécessité d’une très grande simplicité et clarté de l’intention d’une plateforme, dont l’objet (notion de key value proposition) doit être compris très rapidement.

Telles avaient aussi été les conclusions du workshop #CartoCamp avec les étudiants du Master Design Graphique du Campus la Fonderie de l’Image qui avaient imaginé 8 protocoles d’usage et stratégie de plateforme potentielle (voir page dédiée).

En croisant les conclusions de ces différentes étapes de recherche collaborative, ainsi que celles de l’analyse prospective de la constellation artistique du Grand Paris, a été imaginé avec les étudiants de PCA, un canvas de plateforme autour d’une fonctionnalité centrale (toujours reliée à la cartographie des « hotspots » artistiques du Grand Paris).

Autour de cette fonctionnalité pivot dont on ne donnera pas ici de détail (recherche de partenaires en cours), peuvent se tisser facilement de nombreux partenariats innovants et créateurs de valeur entre les acteurs (« pairs ») de la communauté artistique du Grand Paris et d’autres partie-prenantes, artistiques ou institutionnelles, privées ou publiques, de la métropole.  C’est ainsi une autre forme d’écosystème collaboratif qui s’organise autour de la plateforme.

Prototype de commun artistique et culturel

La Convention de Faro conçue par le Conseil de l’Europe en 2005 stipule que les citoyens sont légitimes pour revendiquer leur droit à participer à la vie culturelle de leur territoire. Celle-ci est vue comme une ressource collective pouvant servir aussi bien au développement humain, à la valorisation des diversités culturelles et à la promotion du dialogue inter-culturel qu’à un modèle de développement économique suivant les principes d’usage durable des ressources.

La mise en partage et en « culture » de cette ressource peut être vue comme le socle d’une forme de « Communs » dont la plateforme Paris Galaxies propose un prototype facilitant l’usage et la création de valeur collective, par et pour la communauté créative (au sens large et ouvert) du Grand Paris.